Quand Mitterrand interdisait les spots de prévention Sida
18 ans après la mort de François Mitterrand, les langues se délient au sein de la gauche. Des livres et des témoignages dans la presse révèlent parfois certaines vérités. C’est le cas sur l’implication de Mitterrand dans la vie LGBT et surtout dans la lutte contre le sida, un mot qu’il ne prononcera jamais jusqu’à la fin de son mandat ! En clair, son mandat est plutôt contrasté sur le sujet.
Les premières années de l’ère Mitterrand sont pourtant un grand pas pour les homosexuels. Le 4 août 1982, sur une proposition de ministre de la Justice, Robert Badinter, l’Assemblée Nationale vote la dépénalisation entière de l’homosexualité. Dans les faits, elle n’était plus condamnée, mais la majorité sexuelle était fixée à 18 ans, contre 15 ans pour les hétérosexuels. Avec l’abrogation de l’article 332-1 du code pénal, elle passe à 15 ans pour tous. Alors que la peine de mort est abolie et que les radios sont libérées, le fichier homosexuel de la police est détruit et les harcèlements sur les lieux de drague disparaissent. Les députés votent la fin des décrets discriminatoires. La mention “occuper les lieux en bon père de famille”, qui permettait à un bailleur de refuser de louer un appartement à deux garçons (ou deux filles) disparait. Les hôteliers sont priés de ne plus refuser une chambre d’hôtel à des couples homos. Le code du travail se met au diapason : les salariés ne peuvent plus être discriminés en raison de leurs mœurs.
Mais apparaît le « cancer gay » et Mitterrand change littéralement de comportement. En 1986, Mitterrand doit cohabiter avec un Premier ministre de droite, Jacques Chirac. 1ere rebondissement : le président interdit une publicité pour le préservatif jugé trop sexe et finalement c’est le gouvernement de droite qui l’autorise par décret. La communauté LGBT ne se sent plus aidée dans son combat contre le sida alors que de nombreux malades décèdent. Plusieurs associations historiques disparaissent comme Arcadie en 1982 et le CUARH en 1987.
La pub interdite par Mitterrand
Les choses se corsent ensuite. En 1988, alors que le parti socialiste est pris dans l’affaire du sang contaminé, Mitterrand réélu refuse de faire des campagnes de prévention en direction des homosexuels. On ne le saura que quelques années plus tard.
Il faut attendre près de 15 ans après l’apparition de la maladie pour que Mitterrand prononce le mot sida lors d’une visite à l’hôpital de la Pitié-Salpétrière durant laquelle il confiera être venu au chevet de l’un de ses neveux. Dans des mots très fermes, Act Up-Paris adresse une lettre ouverte au président : « Votre pays n’est plus le nôtre, monsieur le Président. Vous nous en avez exclus […] Nous sommes exsangues et vous ne nous opposez qu’ignorance et mépris”. Entre la gauche et un mouvement militant quasi entièrement absorbé par le sida, le divorce semble consommé ».
Après des premiers mois de présidence plutôt aux côtés de la communauté homosexuelle, François Mitterrand ne cessera jusqu’à sa mort de l’ignorer en même temps que le sida.
Commentaires récents