Première expo d’art homosexuel à Londres

La première grande rétrospective d’art homosexuel a ouvert hier à la Tate Britain Gallery de Londres, pour commémorer les 50 ans de la dépénalisation de l’homosexualité en Angleterre. Intitulée «Queer British Art 1861-1967», l’exposition couvre une période d’un siècle, depuis l’abrogation de la peine de mort pour les pratiques homosexuelles jusqu’à leur dépénalisation.

Présentée comme «la toute première dédiée à l’art homosexuel britannique», l’exposition propose notamment un portrait de l’écrivain irlandais Oscar Wilde daté de 1881, et présenté au public britannique pour la première fois.

«Ce portrait le montre quand il était au faîte de sa gloire», explique à l’AFP la conservatrice Clare Barlow. Il est exposé à côté de la porte de sa cellule de la prison de Reading, où Wilde fut emprisonné après une condamnation à deux ans de travaux forcés pour homosexualité, en 1895.

Côte à côte, les deux pièces provoquent un «coup de poing émotionnel», estime Clare Barlow. «Quand vous voyez un tel objet, vous comprenez que cela a réellement existé, que la vie de cet homme a été complètement détruite».

Cette exposition d’arts visuels s’étend sur huit salles, et explore des thématiques variées comme l’expression codée ou dissimulée du désir, la transgression des conventions et les discordances entre vie privée et vie publique. Elle montre également comment les artistes du 19e siècle maniaient l’ambiguïté pour représenter ce qui ne pouvait être dit – à l’image de tableaux présentant des hommes nageant nus – et comment les artistes ont exploré de nouvelles voies après la Seconde Guerre mondiale.

«Entre ces dates qui marquent l’adoption de textes décisifs, des transformations fondamentales ont eu lieu dans la société, dans le regard que ces gens portaient sur eux-mêmes, dans l’art et la culture», indique Clare Barlow. «Dans un grand nombre de ces oeuvres, la dimension homosexuelle peut être perçue par certains visiteurs, mais pas par d’autres», estime la conservatrice. «Il existe un large panel de réactions au sein du public». «Il faut regarder sous la surface, il y a dans ces oeuvres une richesse incroyable d’histoires qui attendent d’être racontées. Ce sont des histoires de personnes qui se libèrent, qui cherchent le moyen d’être elles-mêmes.»

L’exposition contient notamment des travaux de Francis Bacon, David Hockney, Gluck ou encore Cecil Beaton. Elle présente entre autres le peignoir en soie rouge du dramaturge Noel Coward, et des images de certains artistes travestis dont Danny la Rue. Pour Alex Farquharson, directeur de la Tate Britain, «la compréhension de chacune de ces oeuvres est incomplète sans appréhender la vie sexuelle qui était vécue au moment où elles ont été créées». «Cette exposition est d’autant plus importante qu’elle agit comme un travail de fouille sur un passé caché. C’est une histoire qui communique avec notre époque» affirme-t-il.

L’exposition est visible jusqu’au 1er octobre.