Un militant LGBT algérien séquestré à Marseille

Zak Ostmane (photo), réfugié de 35 ans qui a milité dans son pays pour la dépénalisation de l’homosexualité, a été passé à tabac par deux hommes à Marseille. Violé et frappé, il a pu s’échapper grâce à l’aide de policiers.

Ses deux jours de calvaire ont débuté après un simple verre dans un bar du centre de Marseille. Zak Ostmane, réfugié algérien de 35 ans engagé dans l’aide aux jeunes LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuels, trans, intersexes) a été agressé et séquestré vendredi 3 mars par deux hommes, pendant près de 48 heures, comme le raconte samedi Libération. Il en est persuadé: une substance a été versée dans son verre, resté posé sur une table. Après quelques gorgées, il ne s’est pas senti bien et a décidé de suivre un homme qui l’a justement approché à ce moment-là, raconte-t-il à Yagg. Ce qu’il ne fait pourtant jamais et qui le fait croire qu’il a bien été drogué.

Membre fondateur de l’association Shams France, qui aide les jeunes LGBTI, Zak Ostmane milite pour les droits de ces personnes. Cet engagement lui a valu d’être déclaré persona non grata et de recevoir des menaces de mort en Algérie, où il a milité pour la dépénalisation de l’homosexualité. Il a trouvé refuge en France en 2014, où il poursuit depuis son engagement, comme le montre son compte Twitter. Il a notamment coécrit un livre pour dénoncer les tortures à l’encontre des homosexuels pendant la guerre civile en Algérie, entre 1992 et 2007, souligne Libération.

Vendredi 3 mars, après son passage au bar, l’homme qu’il a croisé l’emmène donc dans une chambre d’hôtel, ce dont il ne prend pas conscience tout de suite. Un autre homme les rejoint. Ils lui proposent de la bière et de la drogue, qu’il refuse. «J’ai suivi parce que j’ai été drogué, mais je me rappelle que dans mon esprit, il n’a jamais été question de sexe», explique-t-il. Il reçoit alors «des coups sur le visage» et perd connaissance. À son réveil, il est en train de se faire violer. «Les coups s’enchaînent, je ne comprends pas ce qu’il m’arrive. Les deux hommes, qui ne parlaient pas bien français, me demandent d’aller me laver, et à mon retour, ils recommencent», raconte Zak Ostmane. Dépouillé de ses affaires puis attaché à une chaise, il est passé à tabac jusqu’à 5 heures du matin, notamment parce qu’il refuse de donner son code de carte. Lorsqu’il crie, il est menacé avec un couteau: «Si tu ne te tais pas, je te tue.»

Le militant reste sous l’emprise de ses ravisseurs toute la journée du samedi et la matinée suivante. Il ne subit plus de violences mais reste sans manger. Jusqu’à ce que dimanche, vers midi, il aperçoive une voiture de police par la fenêtre. À ce moment, l’un de ses agresseurs dort et le second est dans une autre chambre. «Je me suis dit, soit j’ouvre la fenêtre et je crie et les policiers vont venir me sauver, soit je vais mourir ici», confie-t-il à Yagg. Il ouvre alors la fenêtre et appelle au secours. Ses agresseurs lui sautent dessus mais les policiers parviennent à venir le récupérer et à arrêter les deux hommes.

Le jeune homme a passé le reste de la journée de dimanche à l’hôpital, où les policiers ont pris sa déposition. L’association Shams France a diffusé sur sa page deux photos du jeune homme montrant son visage tuméfié.

Une information judiciaire a été ouverte pour cinq chefs d’accusation: viol, séquestration, vol aggravé, violences aggravées et extorsion. Selon les informations du Parisien, les deux suspects seraient un ancien militaire de la Légion étrangère, âgé de 31 ans et un légionnaire affecté au 2e régiment étranger d’infanterie (R.E.I) de Nîmes (Gard). «Les policiers ont entendu des appels au secours provenant de cet établissement hôtelier», indique au quotidien une source proche de l’affaire. Quand ils ont réussi à entrer dans la chambre d’où provenaient les cris, ils se sont retrouvés face à trois hommes, dont l’un avait le visage particulièrement tuméfié». D’après les policiers, le soldat appartenant au 2e R.E.I de Nîmes avait été signalé comme déserteur depuis le 1er mars. D’après La Provence, les deux hommes, qui auraient tenu des propos racistes et antisémites, ont été écroués.

L’association SOS Homophobie envisage de se constituer partie civile auprès du jeune homme et espère pouvoir inclure des circonstances aggravantes d’homophobie aux cinq chefs d’accusation.