Castro, le cubain qui chassait les homos
Une page de l’Histoire de Cuba s’est tournée vendredi soir. Le commandant en chef de la révolution cubaine, Fidel Castro, est décédé à 22h29. L’émotion est forte depuis l’annonce, en particulier pour tous ceux qui ont subi ses persécutions. Parmi lesquels les homosexuels. Rappelons-le, dans les années 60 et 70, dès l’arrivée au pouvoir de Castro, des centaines de gays ont été persécutées, la plupart internées.
Les homosexuels, les « maricones (pédés), seront ainsi perçus comme produits de la société capitaliste et « agents de l’impérialisme ». De 1965 à 1968 précisément, une véritable chasse aux homos est déclenchée. Des centaines de personnes considérées comme « idéologiquement déviantes » ont ainsi été internées dans des Unités militaires d’aide à la production (UMAP). Même après le démantèlement des UMAP, il a fallu attendre 1979 pour que les relations homosexuelles soient dépénalisées et l’homophobie institutionnelle est restée vive dans les années 1970 et 1980. La persécution touchait aussi la culture et l’art. Les autorités ont ainsi interdit la publication d’oeuvres des écrivains Virgilio Pinera et Reinaldo Arenas, car ils étaient gays.
Le mea culpa tardif
Mais Castro va modifier son discours sur les personnes LGBT. Il va trouver sur son chemin sa nièce, Mariela, fille de Raúl Castro, qui milite pour les droits homosexuels. Probablement l’une des raisons de ce revirement. Fidel va jusqu’à reconnaître sa culpabilité dans la persécution des homosexuels (sans doute trop tard pour les victimes). « Après mon arrivée au pouvoir, les représentants des minorités sexuelles étaient persécutés. C’étaient des moments de grande injustice, de grande injustice ! », avait reconnu le leader de la révolution cubaine dans une interview à la presse en août 2010. « S’il y a quelqu’un de responsable, c’est moi », avait-il ajouté.
Revirement
Les choses ont radicalement changé, ou presque, du moins en apparence. Aujourd’hui, la société cubaine rembourse intégralement les opérations de chirurgie transsexuelle. Mais les interpellations de gays restent nombreuses. Dernièrement, un trentenaire homo affirmait avoir été exclu de l’Université pour avoir organisé l’élection de Mister Gay. « Les excuses de Fidel ne signifient rien tant que la police n’arrête pas de nous persécuter », juge-t-il.
Dépénalisée en 1979, l’homosexualité « ostenstible » cesse d’être poursuivie en 1988, avec le soutien de Fidel Castro qui déclare : « Il est temps de changer les attitudes négatives envers les gays dans le Parti et la société. » Les dernières références homophobes sont supprimées de la loi cubaine en 1997.
Avocate des droits LGBT
Mariela (photo), sa nièce, va faire de la défense de la communauté LGBT son cheval de bataille. Les gays cubains ont trouvé leur avocate. A la tête du Centre national d’Education Sexuelle, elle mène plusieurs actions. En décembre 2008, Cuba fait partie des 66 pays de l’ONU à avoir signé une déclaration en faveur de la dépénalisation universelle de l’homosexualité. En mai 2015, elle organise même symboliquement plusieurs unions de couples gays et lesbiens à l’occasion de la journée contre l’homophobie et la transphobie. Une première à Cuba.
Certes, les droits LGBT à Cuba sont aujourd’hui non négligeables mais ils ne doivent pas faire oublier les centaines d’homosexuels qui ont été persécutés par le même Fidel. Les gays cubains ne pleurent pas la mort du père de la révolution, ils la célèbrent.
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